HUAHINE part en fumée_photos
EtoileDeLune
nathalie & dominique cathala
Sun 18 Sep 2011 19:27
Bonjour, Je vous racontais mon enthousiasme à découvrir la baie d'Avea. Les oiseaux qui chantaient dans les collines à la tombée du jour, et les collines tapissées d'une belle forêt. Hé bien! En à peine 24 heures, notre mouillage s'est révélé sous un autre angle. Nous savions qu'un coup de mara'amu était annoncé. La configuration de la baie ne laisse pas présager d'une mauvaise protection, néanmoins les guides nautiques, nous avertissaient qu'en cas de vent de sud et d'est les rafales étaient légion. En connaissance de cause, nous avons choisi notre mouillage. Décidant, dans un tel environnement de faire le dos rond! Le vent se lève comme prévu dans la nuit de vendredi à samedi. Rien d'agréable, rien d'insurmontable non plus, la vie de bateau, en somme... Notre Etoile tire sur sa chaîne, se bride dans les rafales, l'ancre est plantée dans le sable, l'alarme mouillage est de fonction, tout va bien. Samedi matin en contactant une personne locale, elle nous avertit qu'un requin-tigre rôde dans la passe de Parea, située juste au sud du mouillage. Pour arriver jusqu'à nous, ce gros vilain poisson aux grosses dents devrait traverser le platier qui lui offre que trop peu d'eau... Du moins, c'est ce que nous pensons. Néanmoins, nous décidons de nous faire une petite journée tranquille à bord... J'ai de l'occupation en suffisance, des clichés à retailler pour le blog, le site internet... de la documentation à lire... une foule de choses qui m'empêcheront de penser au vent, aux rafales et au gros requin-tigre (celui-ci, et tous ses collègues détiennent le triste record, derrière le requin blanc, du nombre d'attaques sur les humains) Je m'installe dans le cockpit, avec mon ordi. Quelle plus belle situation? Mon bureau au creux de la plus belle piscine du monde, vue sur les collines verdoyantes? Je démarre avec allégresse le choix des clichés que je vais vous proposer. Mais, une odeur suspecte me titille les narines. Je lève la tête. Je n'en crois pas mes yeux, les collines si belles sont envahies d'une fumée épaisse suivie d'énormes flammes orange. Spectacle ô combien désolant que de voir la forêt, qui mit des années pour atteindre une telle maturité, s'anéantir par la faute d'inconscients! Petite, j'ai vu les collines de la côte Varoise entre Les Issambres et Agay (notre fief) partir en fumée. A jamais, je suis marquée par les incendies de forêt, un spectacle affligeant. Il a suffi de dix ans de cendres, pour voir le béton d'un célèbre "camp de vacances à prix partagés" pousser à la place des arbres. Ici, les incendies ne sont pas dictés par des plans immobiliers sans scrupule, mais par l'imprévoyance, une légèreté irresponsable (euphémisme que vous m'autoriserez). Disons le mot juste : une inconscience criminelle! Ils se disent : "c'est samedi, je vais nettoyer le jardin, ils rassemblent toutes les palmes des cocotiers tombées, et pouf... "On met le feu"... Si ce n'est le jardin, c'est la cocoteraie, le gagne-pain des coprayeurs, qu'ils "nettoient" brûlant les déchets des cocos sans prendre garde que le vent est fort. Rapidement leur feu censé assainir leur terrain, n'est plus maîtrisable. Ils voient partir en fumée leur terre, mais la destruction gagne celles du voisin, et du voisin... et du district voisin, menaçant les habitations sous le vent de leur absurde obstination à vouloir "faire propre"... Depuis les Marquises nous voyons les monts des îles de Polynésie brûler, à Nuku Hiva, à Tahuata, à Moorea, et à présent à Huahine. Rien n'arrête le feu, les pompiers n'ont aucun moyen, pas le moindre canadair. Il suffirait pourtant d'interdire par décret les feux par période de grands vents. Je sais les Polynésiens "obéissants". Ils sont comme de grands enfants, et tant qu'on n'éditera pas une loi avec à la clé des punitions pour tout responsable d'incendie, la Polynésie continuera de brûler. Nous avons entendu à la radio, d'anciens maires à la retraite s'exprimer sur le sujet. Tout le monde sait qui est responsable, tout le monde bougonne, mais personne ne fait rien pour enrayer le mal... Honte à l'incendiaire! Au coucher du soleil, nous voyons, enfin, un camion de pompiers passer rapidement sur la route sous la forêt qui brûle depuis douze heures. Les gyrophares en fonction, mais il ne s'arrête pas. Puis enfin, à la nuit tombée, nous voyons plusieurs véhicules avec des gyrophares. Ils patrouillent sur la route. Entre la forêt en amont et les habitations le long du rivage. J'espère qu'ils resteront au près de la population toute la nuit (ce ne sera pas le cas). Avec la noirceur, nous discernons de nombreux foyers qui se propagent sous les rafales. Le vent ne cessera pas avant mardi. Si les dieux maohis aiment encore leur terre, qu'ils lui envoient un gros grain, une pluie violente pour cesser ce carnage! "Accepte ce que tu ne peux changer" m'a dit un sage... Même au Paradis, dans la même journée, nous pouvons subir un coup de vent, l'ombre effrayante d'un requin-tigre et assister, l'âme impuissante et triste, à un incendie de forêt. Sur les cinq bateaux présents, nous sommes seuls à être restés au mouillage. Pas par voyeurisme, mais à moins de partir au large et de nous jeter dans la houle et le mara'amu, il n'y a pas grand choix. L'incendie à lieu au sud est de l'île. Le vent souffle de sud est, et tous les mouillages sont situés sous le vent de l'incendie. Nous avons trouvé une place à l'écart de la fumée suffocante et des volutes de cendres qui envahissent le pont, entrent dans le bateau. Nous pensons aux habitants de la côte, pour qu'ils ne perdent pas tout... Nous pensons à la faune, aux oiseaux que nous entendions chanter, là où aujourd'hui leurs nids sont brûlés. "On ne changera plus le monde, mais il ne nous changera pas non plus..." (JJG O belle) Demain est autre jour et le soleil se lève aussi. Et Promis... j'ai aussi de belles images en stock, celles qui existent, qui sont là... à portée des hommes qui désirent les connaître pour mieux les protéger. Amitiés marines Nat et Dom www.etoiledelune.net |