Panama_Lemmon cays_rencontre gentille famille kuna

EtoileDeLune
nathalie & dominique cathala
Sun 20 Dec 2009 14:10
9:32.766N 78:53.609W
LEMMON CAYS
 
Objet : A LA CROISEE DES CHEMINS 
Rencontre d'une famille attachante
 
Photos :
îlot de Robinson et en arrière-plan l'îlot de la petite famille de Lemmon Cays
La famille de l'îlot sans nom (Indira en tee-shirt orange Edelmiro tout mouillé en short à gauche)
Edelmiro sur mon kayak
Isup dans son hamac avec son bébé
A l'approche de l'îlot
 
 
Bonjour,
 
Lemmon cays offre une dizaine de piscines qui se dessinent au milieu d'un dédale d'îlots.
 
Un paradis pour faire du kayak! 
 
Mes coups de pagaies me conduisent dans la piscine de l'extrême est de l'archipel. Au beau milieu du plan d'eau, un îlot m'intrigue. Des cabanes mal fagotées lui donnent un air de Robinson Crusoé. Si j'étais enfant, je viendrais jouer dans cette cabane, je me fabriquerais des sabres de bois, des radeaux qui coulent et j'y jouerais à longueur de journée. Des cris me tirent de mes rêveries. Un enfant agite les bras, se jette à l'eau, ressort en tapant l'eau, et crie à nouveau.
 
Une hystérie soudaine?
Non, non un gamin, heureux de voir un kayak approcher son île.
Il fait tant de signes et de simagrées que je ne lui résiste pas. Je rame fort contre le vent et j'arrive à sa hauteur. Il me parle kuna. Il crie et il attire toute sa famille. On me fait signe d'échouer mon kayak sur la petite plage où un ulu est remonté. Une myriade d'enfants et deux femmes m'accueillent. Et là je regrette de ne pas avoir appris par coeur le petit glossaire de kuna que j'ai mis sur Internet. Cela fait deux ans que je n'ai pas pratiqué. Je n'entends que des voyelles. Et le petit mot magique me sauve :
"Nuedi."
 
Nuedi veut tout dire en kuna. Bonjour, au revoir, je suis contente, et merci... voir plus encore!
Après mon "Nuedi" lancé à la cantonade, des nuedi fusent de toutes les petites bouches. La femme qui m'accueille a un sourire radieux. C'est très rare de voir les kunas sourire si spontanément. Je lui dis que je m'appelle Natalia. Elle s'appelle Inesita.
 
La bouche fendue d'une oreille à l'autre, Inesita m'entraîne au milieu de l'îlot. Deux cabanes laissent échapper l'odeur caractéristique de leur feu à l'écorce de coco. Des hamacs sont tendus entre les cocotiers, elle m'entraîne près de l'un d'eux, où un bébé et sa maman dorment. Elle me parle sans cesse, comme si je comprenais le kuna. Elles sont trois femmes adultes et combien d'enfants? Mon dieu, je ne les ai pas comptés. Le petit dernier a 8 mois.
 
Quelque chose se passe. Un courant se crée. Je ne peux exprimer ce que je ressens, je suis débordée par cet accueil si spontané. Sans idée, sans savoir qui je suis, ni d'où je viens, ils m'ouvrent leur île. Nous ne nous comprenons pas et pourtant l'alchimie magique des affinités fonctionne. Les enfants sortent tout ce qu'ils ont. Des coquillages superbes qu'ils ont polis, des noix de coco, le molla non terminé de leur mère. Ils sont adorables et me gardent parmi eux un petit moment.
 
Je suis stupéfaite de trouver ce petit bout de terre, si ravissant, et si proche de Porvenir (port d'entrée) et en même temps si éloigné de tout.
Ces femmes sont déconnectées du monde. Elles ne parlent que le kuna ce qui accentue le décalage.
 
Pourtant, pas loin, à Porvenir, un bateau de croisière est arrivé! Un bateau avec 400 touristes à bord. Ces familles habitent si près du monde qui change et qui se modernise et pourtant, et elles en sont encore si loin... Leur îlot n'a pas même un nom. Personne n'a pris la peine de le répertorier. Mais ces femmes existent, elles sont là, à longueur d'année et vivent de l'entretien de leur cocoteraie et de la pêche dans le lagon. Chaque jour, elles voient des voiliers passer de l'autre côté de la barrière de corail, et quand même elles paraissent seules au monde.
 
Au bout de palabres incompréhensibles et de sourires, à contrecœur, je fais signe que je vais continuer mon chemin. Edelmiro, le garçon qui m'avait appelée, m'aide à remettre mon kayak à l'eau et monte avec moi. Et me voici à ramer pour deux. Je l'emmène jusqu'à l'îlot de Robinson qui faisait renaître ma part d'enfant. Il rit aux éclats sous le regard attendri de sa mère. 
 
En revenant au bateau, je prépare des cadeaux pour les trois familles : des vêtements, du lait, des biscuits, de l'eau (claire du dessal qui les changera de cette eau saumâtre filtrée par le sable) et tout ce qui me paraît pouvoir leur faire plaisir ou leur être utile. Au soir, Indira, l'une des mamans, vient au bateau. Son mari dirige le ulu. 
Mon Dieu ! Je n'avais pas réalisé à quel point ils étaient jeunes!
Je suis contente de les voir et je donne l'un des sacs préparés pour sa famille. Elle a un si beau sourire... Pas besoin de se parler et de comprendre le kuna, les yeux et les gestes suffisent.
 
Le lendemain matin c'est au tour de Inesita de venir avec son mari Modesto (je connaîtrai toute la famille!), car Edelmiro, son frère Omar et Juan Cristian le petit dernier sont là aussi. A leur tour de recevoir leur présent. Ils désirent des oignons, de l'eau en supplément. Que suis-je bête? Je n'y avais pas songé! Et je leur promets que l'après-midi nous leur ferons une visite à leur île.
 
Nous revenons l'après-midi, l'une des petites filles est fière de me montrer qu'elle porte un nouveau tee-shirt. Nous donnons à Inesita les photos que nous avons faites de la famille. Ce présent a le don de les rendre perplexes. Ils se regroupent autour des photos. Ils forment un cercle compact et conversent entre eux. Inesita part dans sa hutte et revient avec deux noix de coco. C'est leur plus grande richesse... C'est "un regalo" (un cadeau).
 
Depuis cette journée, régulièrement la petite famille vient au bateau. Elle prend L'Etoile de Lune pour un sapin de Noël, d'où il suffit de tirer un cadeau, pour combler quelques manques. J'avoue que je ne leur résiste pas...
 
Bonne préparation de fêtes à tous...
Que cette fin d'année vous apporte  féérie et  bonheur
Nat et Dom

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