Colombie_Islas Rosarios
EtoileDeLune
nathalie & dominique cathala
Tue 17 Nov 2009 20:33
10:10.42N 75:45.34W
Objet : Des boules quies et une belle
brise
Bonjour,
Nous quittons les fêtes de Carthagène, le jour où toute la
Colombie a les yeux rivés sur les plus belles filles du pays. Le 16 novembre,
Miss Colombie, la Reina pour toute une année, sortira des scrutins. Nous nous
éclipsons, laissant derrière nous la ville trépidante où pirates, jolies filles
et cumbia sont les rois.
En relevant les deux
ancres (nous en mettons toujours deux lorsque nous laissons le bateau souvent,
cela permet de se balader l'esprit tranquille), mon capitaine tâte de près les
fonds glauques du mouillage. Il en revient, les mains plus salies que s'il avait
passé la journée dans la cage moteur d'un vieux camion qui aurait fait le tour
de l'Amérique latine. Une vase collante, noire comme la suie, s'attache à sa
personne, il mettra la journée à la retirer.
Nous sortons vers le large par Boca Grande. Nous saluons
la haie d'immeubles qui tente d'atteindre le ciel sans jamais parvenir à tutoyer
les nuages. Sortie par le côté le moins reluisant de la cité. Je pense aux
navigateurs qui arrivent ici pour la première fois, et qui devant cet ensemble
doivent se sentir bien découragés. A bâbord le complexe immobilier ressemble à
Acapulco, sur tribord les cargos se succèdent à un rythme soutenu sur les quais
d'un ensemble industriel... et au fond... tout au fond, la ville les attend pour
leur laisser le merveilleux souvenir.
Au revoir Carthagène,
nous te laissons à tes festivités et à cette évolution inévitable, pourvu
qu'elle ne gâche pas ton charme... Essaye, si c'est encore possible, de ne pas
céder aux démons du tourisme défigurant.
A la hauteur de Boca Chica au sud de Carthagène, nous
croisons un dauphin, il laisse ses congénères et en quelques bonds il rejoint
notre étrave. Grand, le nez pointu, gris uniforme, voici un dauphin à long bec.
Les anglais le nomme spinner dolphin ce qui signifie
« dauphin-vrille », car il est le roi des cabrioles, seul ou
accompagné il saute, bondit, virevolte. Il aime à la fureur les étraves de
bateau et n'y résiste que rarement... La nôtre le tente ainsi que quatre de ses
copains. Ils filent de concert à l'étrave. Quelle belle glisse, quasi sans
respirer ils précèdent L'Etoile de Lune. Je me penche par-dessus les filières.
J'adore les oeillades qu'ils me lancent en nageant sur le flanc. Irrésistibe
rendez-vous du large. Leur compagnie est à mes yeux une marque de bienvenue pour
notre retour vers le large. Elle est aussi mon porte-bonheur préféré, avec eux à
l'étrave je me sens toujours protégée.
Pour le reste de la navigation, pas de problème, si ce
n'est que nous l'avons entièrement faite au moteur. Moi j'étais ravie, non que
j'aime la navigation à la motogodille, mais Dom en a profité pour me remplir des
seaux d'eau dessalinisée, et je pourrai faire la lessive afin que rien ne traîne
dans le bateau. Le capitaine par contre, vit l'une des plus cuisantes
frustrations nautiques de sa vie. Car le vent absent alors que nous étions en
mer se met à souffler une heure après que nous ayons jeté l'ancre. Un bel alizé
pousse un bateau qui arrive toutes voiles dehors.
Le capitaine se
consolera en soirée, lorsque celle-ci tamisée par l'alizé ne sera plus aussi
chaude que celles que nous avons connues ces quinze derniers jours. Depuis que
nous avons quitté Aruba, nous avons traversé une période où le ventilateur s'est
montré particulièrement paresseux. Cela nous a permis de passer la côte de
Colombie facilement, mais sans le vent les matins étaient lourds, les après-midi
étouffantes et les soirées irrespirables. Le moindre mouvement nous faisait suer
à grosse goutte. Là tout est parfait... Il fait relativement plus frais, nous ne
dormirons plus en baignant dans notre jus.
Parfait ?
Hum! Sauf pour les oreilles, en ce jour de fête, Rosario accompagne Carthagène. A croire qu'un pont de décibels relie l'archipel à la cité et que Rosario, si calme il y a deux ans, s'est transformé en banlieue tapageuse. Nous avons la sensation d'avoir planté l'ancre dans une discothèque. Pom pom pom repom re pompom... il doit y avoir une boîte à musique qui ne connaît qu'un seul air ! Elle abrutit pas mal les bonnes âmes. Mais on ne peut aimer leur joie de vivre et en plus leur
demander de rester calmes.
On verra ça demain... Nat et Dom
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