BORA_MOTU TANE_Paul Emile Victor_récit et photos

EtoileDeLune
nathalie & dominique cathala
Fri 7 Oct 2011 16:58
Suite de la saga des ISLV : Paul Emile Victor choisit le Motu Tane

Bonjour,

Au nord, Bora Bora est couronnée de motus, véritables remparts contre la voracité océane. L'un d'eux, nommé Tane (l'homme en tahitien) séduisit Paul Emile Victor.

Un ami lui offrit le tour de Bora en avion, en décembre 1958, tandis qu'il survolait le lagon, PEV écrit dans son carnet de voyage : "nulle part ailleurs au monde".

L'ethnologue a parcouru les régions les plus froides du monde, il s'est intéressé au mode de vie des Inuits jusqu'à partager leurs moeurs et prendre pour compagne Doumédia, une femme esquimaude. Pourtant, il tombe littéralement amoureux de Bora Bora, île au tempérament chaud et doux du Pacifique Sud.

En 1963, s'offre à lui l'opportunité d'acheter un motu, mais il ne s'y installe pas encore. Il poursuit son oeuvre dans la Mission Paul-Emile Victor jusqu'en 1976. De la trempe des héros, Paul Emile Victor défend notre belle planète. Il part du principe que rien n'est impossible. Son optimisme instinctif et sa formation de scientifique le mettent au service de la nature et de son sauvetage. Il crée en Terre Adelie, la base Dumont d'Urville. Au cours de ses explorations polaires, il mène des campagnes contre les pollutions, les destructions de la biosphère. Il combat l'ignorance et l'inconscience responsables de carnages sur les pingouins empereurs, les phoques, les éléphants de mer ou les baleines. Il s'adresse au public, à la salle Pleyel, à la radio ou à la télé afin d'informer son auditoire des risques que courent les espèces de notre planète. D'une foi et d'un optimisme à toute épreuve, PEV sait enthousiasmer et rallier le plus grand nombre aux causes environnementales qu'il défend.

En 1977, à l'âge de 70 ans, il part avec Colette sa dernière épouse vers Bora. Il dira : "Ici (Paris) je suis absorbé, dévoré par mille petites préoccupations qui dévorent mon temps, m'empêchent de penser, de lire, et surtout d'écrire. J'ai décidé de quitter Paris et de m'installer, pour mieux travailler, à Bora Bora."

Paul Emile Victor qui avait déjà écrit de nombreux récits de souvenirs rédige à Bora (la Mansarde, 1981; l'Igloo, 1987), des traductions (Poèmes inuits,1951), des études ethnographiques sur les Inuits (la Civilisation du Phoque : jeux, gestes et techniques des Esquimaux d'Angmassalik, 1989).

Trente ans après son arrivée sur Bora,
il dira: "A Paris, je perdais trop de temps. Ici, je ne fous rien.". Il voit Bora qu'il a connue sans route, sans commodité se transformer peu à peu en destination touristique. Néanmoins, Bora, reste à ses yeux: "la plus belle île du monde par l'équilibre des volumes, des surfaces." Il y retrouve le nombre d'or. "Un triangle 10 x 6 avec une base 12. Cette recette d'architecte s'applique à tous les grands tableaux, à la pyramide d'Egypte, aux plans d'eau du château de Versailles, etc. A Bora Bora, je me suis amusé à comparer la hauteur de la montagne à la surface du lagon, et j'ai retrouvé ce nombre d'or. Cela donne une extraordinaire impression d'harmonie."

Si PEV dévore la vie paisible de Bora, il y a aussi connu la ruine! Le cyclone Wasa en décembre 1991 détruit son motu, emporte les 6000 volumes de sa bibliothèque. "L'eau a déferlé comme un torrent de montagne et ça a tout emmené." déclara-t-il à un journaliste de l'époque. Ce cyclone met à mal les finances du couple, PEV vit d'une retraite équivalente au SMIC. En 1993, c'est l'embolie. Loin de le décourager, ce choc le plonge dans l'optimisme qui le caractérise, encore alilté, il pense :"Il n'y a plus une seconde à perdre. Il faut se vautrer dans la vie, il faut se saouler de la vie." Pour autant ces expressions ne le plongent pas dans une vie de débauche. L'explorateur a toujours su "tirer un grand trait rouge au-delà duquel, je ne vais jamais sous aucun prétexte. Au-delà, c'est lorsqu'on ne défend pas sa liberté ou ses libertés. Et... on est mort."

Naturellement, Paul Emile Victor partage sa vision de la mort : "Je ne la redoute pas, elle m'ennuie. Je la trouve idiote. La mort, cela m'est égal. Ce qui m'emmerde, c'est d'arrêter de vivre. J'aimerais vivre encore dix, cinquante, cinq cents ans." Quant à sa perception de la religion, il déclare :"Je pense que Dieu existe. Pas sous la forme du barbu assis sur un nuage et qui vous écoute, vous et vos jérémiades et vos tristesses. (...) Les hommes peuvent aussi peu appréhender Dieu que les poissons l'électronique. Avant de se suicider, Koestler a écrit sur son bout de papier : "J'espère qu'il y a quelque chose après.", El bien, moi aussi, je l'espère et si c'est le cas, je ferai tout ce que je pourrai — je n'y arriverai probablement pas plus que les autres — pour faire savoir qu'il y a quelque chose après."

Paul Emile Victor rêvait de laisser de lui "l'image d'un honnête homme", lorsqu'il s'éteint en 1995, le monde garde de lui, l'icône d'un homme non seulement honnête, mais également,enthousiaste, humble, un formidable pionnier de l'environnement laissant derrière lui des disciples conscients des mêmes dangers à combattre.

En 1995, la frégate "Dumont d'Urville" quitte le lagon pour les eaux profondes. Elle emporte à bord, le corps de l'explorateur, qui a désiré des obsèques de marin.

Amitiés marines
Nat et Dom
www.etoiledelune.net
Sources :
Les citations ont été recueillies par Christian Brincourt, M Lasseur et S Granadam entre 1993 et 1995
Les timbres sont issus du site bibliographique : http://www.bookine.net/paul-emile-victor.htm

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