Vava'u (suite)

Canopus 3 on the Blue Water Rally
Jean Michel Coulon
Fri 20 Jun 2008 19:26
(MP)
L'interruption était due au changement de quart. Je reprends la suite de notre séjour à Vava'u.
Le temps est variable, le vent d'est est fort et pousse plein de nuages et d'averses. Finalement nous n'aurons vu Tonga sous le soleil que par intermittences et quelques minutes seulement. On n'a pas froid, on sèche vite, il n'y a pas desoin de laver les ponts pour décroûter le sel, mais il fait gris. Bien entendu les prévisions disent que ça va s'arranger la semaine prochaine...
Après la plongée de mardi nous avons rejoint le Rally ancré au bout de l'ile Pangaimotu dans une baie fermée par l'ilôt Tapana, en ayant séché une fois de plus la course en dinguy.
Au programme de la soirée, une fête tongane, destinée à soulager les touristes des dollars tongans qu'ils ne pourraient pas utiliser ailleurs. Accueillis à 18h30 avec enthousiasme par une ribambelle d'enfants nous aidant à tirer les annexes sur le sable, dans la nuit heureusement pas noire - c'était la pleine lune ou presque - nous avons admiré les productions artisanales locales présentées par les femmes du village voisin à même le sol ou sur des tables: coquillages, bracelets et colliers de graines, bois sculptés, tapas et autres pailles tressées. Les transactions se faisaient à la lampe de poche. La qualité n'était pas meilleure que ce que l'on pouvait trouver au marché de Neiafu mais les prix plus bas. J'y ai retrouvé le gars qui fait là-bas en barque du porte à porte d'un yacht à l'autre avec cette bimbeloterie. Entreprenant quoi ! Un petit orchestre d'instruments traditionnels fournissait le fonds musical indispensable aux opérations marchandes, couvrant le bruit des conversations des yachties heureux de se retrouver depuis la veille en ingurgitant force bières. Percussions et cordes pincées. Il y avait un instrument qui tenait de la contrebasse par la taille, genre caisse de bois surmontée d'une haute planche avec deux cordes... les moyens du bord !
Puis ce fut l'instant du diner, que des plats locaux présentés sur des feuilles ou dans des tiges de bananier coupées en deux formant assiettes, le tout amoncelé sur des trétaux recouverts de feuilles de bananier. Abondance et ignorance totale de ce qui pouvait être devant nous ou, enveloppé dans une feuille, cuit à la vapeur au four local (un trou dans la terre): un coup du poisson, un coup du cochon, ou une espèce de pâte à beignet assez graisseuse qui a fait les délices à la fin du repas de ceux qui ont la dent sucrée et besoin d'un dessert. Pas de fruits, ils n'ont pas l'air de faire partie de l'ordonnance d'un repas. Nous étions assis sur des bancs, concession accordée à nos genoux incapables de supporter des positions accroupies. Mais pas de couverts, pas de gobelets - de toutes façons rien à boire sauf à être venu avec son stock de bières ou de vins, ce que tous les autres avaient su faire. Nous avons donc mangé avec nos doigts. Rien n'était immangeable mais cela manquait nettement de saveurs... nous échangions nos impressions en soulignant ce qui nous avait paru intéressant, le problème étant alors de retrouver la même préparation !
Après ce repas peu mémorable, nous sommes passés au spectacle, l'orchestre complété par des choeurs soutenant de (très) jeunes danseurs et danseuses, dynamiques (les premiers) et intimidées et gracieuses de ce fait (les secondes). Où avaient-ils caché leurs jeunes filles et leurs jeunes hommes ? Une belle corbeille était posée en avant pour inciter spectateurs et spectatrices à y déposer le fruit de notre admiration qui servira à financer les études de high school de notre jeune troupe. Les locaux ont montré l'exemple en y jetant des billets de un ou deux dollars. Certains mettaient carrément le billet dans la chemise ou sur la tête de leur danseur ou danseuse préférée. Et dames ou messieurs du Rally, selon qui gère les finances du bord, y sont allés de leurs billets de 5 ou 10 dollars, mais dans la corbeille. 
Une petite fille d'à peine deux ans, installée sur la natte des musiciens, s'est précipité sur un billet qu'elle allait rapporter avec elle mais rabrouée par une soeur ainée, et encore hésitante sur la conduite à tenir, elle est allée finalement le déposer dans la corbeille sous les rires de l'assistance. Après ce fut une vieille, engoncée dans son ta'ovala (une natte de pandanus enroulée autour du corps, nouée à la taille avec une ceinture de fibres de cocotier), qui après avoir déposé son billet s'est mise à danser elle aussi, se trémoussant tant qu'elle en perdit son ta'ovala glissé par terre, ce qui ne l'arrêta pas, toute à sa danse. On a bien ri.
Mercredi, c'était de nouveau une journée Rally avec un "barbecue" sur une ile déserte. On s'y dirige toujours par chemin de terre ou de mer et on se retrouve près de Kapa face à Nuku, petit ilôt avec une belle plage de sable blanc et, dans les buissons, tout le nécessaire pour les sorties barbecue: tables et bancs, toilettes du type outhouse dames et messieurs quand même. Côté barbecue, ce fut raté, rien de grillé sur place, une simple assiette ganie de cochon et poulet, pas de fruits et bien sûr pas de boissons, mais cette fois-ci j'avais prévu le coup ! On était encore tous contents de se retrouver une fois de plus.
Avec Bernard et Camille de Miss Styx, nous sommes partis en dinguy visiter la grotte dite "Swallows' cave", une attraction locale qui n'est accessible que par mer. On accroche l'ancre du dinguy à un rocher et on pénètre à la nage dans une immense et haute salle. Stalactites et stalagmites de différentes couleurs, un bref rayon de soleil, un fond bleu presque lateux de plus de 15 mètres. Plutôt chouette. En mal d'aventure, nous traversons le passage nous séparant d'une autre ile Nuapapu, où se trouve une autre grotte, "Mariner's cave", superbe, qui elle n'est accessible qu'en plongeant et en nageant sous l'eau 6/7 mètres. Pas la mer à boire quand même. On explore les bords mais on a beau chercher, y compris en plongeant pour vérifier dans les anfractuosités, rien, on ne trouve pas. En plus le ressac assez fort nous dissuade de nous aventurer plus et on rentre en longeant une côte très sauvage, de falaises calcaires hérissées d'une végétation touffue. Sur un rocher, à 2/3 mètres au-dessus de nous, une chèvre sauvage et ses deux chevreaux, perchés sur un bout de rocher, nous regarde passer. Plus loin ce sont deux grandes chauvesouris qui s'envolent, dérangées par les sons de notre moteur. Retour aux bateaux, pluie et embruns. Mouillage dans la baie de Maurelle, bien à l'abri du vent. Chants de coqs soir et matin comme partout en Polynésie.