TERRE

Aviez vous donc remarque ce silence insistant
du cote de la partie feminine de l’equipage –en l’occurrence la
partie temporairement incompetente de l’equipage…- durant cette
traversee ? Marguerite et moi avions tout naturellement repris la position
allongee, entre banquette et couchette, que nous adoptons habituellement
lorsque nous quittons un port ou une amarre. Grace a l’excellent « mercalm »
et ses comprimes secables permettant une extraordinaire flexibilite posologique
fort appreciee par les puristes que nous sommes, nous avons pu avoir nos
moments de quasi euphorie ; un dejeuner de plus de 3 minutes et demi partage
avec nos compagnons de bord, quelques vaisselles effectuees au milieu de creux
de 4 metres, la surveillance inquiete de petroliers geants lances a toute
allure vers nous en pleine nuit, mais surtout, surtout, des couchers de soleil
absolument saisissants – nous voguons et voguerons vers l’ouest –qui,
a posteriori, rattrapent toutes nos mesaventures de mal des transports . Il
faut dire que nous avons eu a faire a des equipiers particulierement
comprehensifs, qui non seulement s’occupaient des quarts de nuit, de la
mecanique, de la peche, mais aussi des repas et des vaisselles lorsque les
volontaires designes etaient a fond de cale. Nous sommes arrives aux Iles San Blas il y a 2
jours, et il nous a bien fallu ce temps pour nous remettre de notre
emerveillement a deux parfums : le premier fut de decouvrir ces alignements
de splendides cocotiers emergeant soudain des flots, apres une semaine de
traversee sans terre a l’horizon, suivi du merveilleux plaisir de rester stable
sur un bateau et d’apprecier un petit dejeuner sans aucune medication. Vous
ai-je déjà dit qu’ensuite nous avons tous saute dans l’eau
transparente pour rejoindre la plage de sable blanc bordee des fameux cocotiers
dont je parlais precedemment ? Panama, grand centre d’affaires de la
planete, est seulement a quelques dizaines de kilometres d’ici, et nous avons
rencontre aujourd’hui les Indiens Kuna qui vivent de peche et d’echanges
sur cet archipel des San Blas, sans aucune connection avec le monde exterieur…
Il est tard. Je vais rejoindre ma couchette,
alors que Henry et Chris ont pris le dinghy (orthographe a confirmer…)
pour aller explorer les feux de joie qui brulent sur la rive depuis tout a l’heure. Je pense a Denis, qui j’espere a lui
aussi trouve son paradis. Dormez bien… Marie-Anne – Departement Intendance (sur
mer calme) |