Morombe - Tulear (+photos)

Arafura
Tue 15 Mar 2011 17:30
L’étape Morombe Toliara se monte à une centaine de miles (180 kilomètres). Finalement nous couvrons plus de 140 miles, merci à un vent soufflant fraîchement du Sud qui nous oblige à tirer des bords durant la nuit. Arafura n’adore pas le près serré (ni d’ailleurs la majorité de l’équipage). Il saute sur les crêtes, tombe dans les creux, est bousculé par un mouton qui s’écrase sur un flotteur et sa sole tape dans les creux régulièrement, réveillant les dormeurs. A mer agitée, sommeil agité ! Vers trois heures du mat’, le vent adonne et on peut mettre du Sud dans notre route et l’on file de sept à neuf nœuds sur une mer qui reste bordélique et incapable de mettre de l’ordre dans l’anarchie des houles qui accourent de toutes parts. L’arrivée sur Toliara est facile (on se méfie plus sérieusement des patates…) et on finit par mouiller dans un mètre d’eau, à deux pas d’une flottille de pirogue à voile (comme d’hab quoi…).

A peine l’ancre a-t-elle mordu la vase confortable du fond, une silhouette de Blanc se dessine à l’horizon, avançant gaillardement vers Arafura. Ce Blanc est en vrai Blanc d’Australie qui traîne sous les tropiques depuis qu’il a quitté sa maman. A plus de 55 ans, il continue à surfer, à bronzer, à boire et à collectionner les filles qu’il rétribue pour services rendus. Et a plus de 55 ans, il a encore une bonne mémoire, puisqu’il se rappelle d’Arafura aux Philippines (on s’y était croisé au chantier dans lequel Arafura a péniblement vu le jour). Bref, le monde est petit et Mike n’en revient toujours pas d’avoir vu apparaître Arafura dans la passe d’entrée…

Toliara est une ville comme tant d’autres à Madagascar. Une population qui augmente régulièrement, un état qui s’endort profondément. Visiblement, il n’y a pas eu d’investissement depuis longtemps, depuis si longtemps que l’on se risque à penser que depuis les Frouzes sont partis, pas un centime n’a été investi dans les routes de la ville. Pareil pour le balisage qui ne s’allume plus depuis les joies de l’Indépendance se sont éteintes.

La hiérarchie sociale semble immuable : Les Indo Pakistanais tiennent le commerce, les Locaux éduqués occupent les postes clés de l’Administration et se font une joie de chasser l’Argent par tous les moyens. La Corruption et la Paresse règnent en maître et ceci sans méchanceté, c’est déjà ça… Les Locaux non éduqués vont pêcher, pêcher et encore pêcher sous un Soleil de plomb et un vent parfois agressif. Leurs embarcations sont superbes en photo mais demeurent des outils de travail peu performants. Leurs voiles ne sont que l’expression de leur profonde pauvreté. Ils s’en tirent pour l’instant, mais tout le monde se plaint de la difficulté grandissante de pêcher de bonnes prises. Par exemple, à Morombe, une ONG avait distribué des moustiquaires qui ont fini comme filets. Bref, toute la faune du genre crevettes et poissons de corail a fini dans les filets-moustiquaires. Sur les marchés, les crevettes s’appellent toujours crevettes mais leur taille se rapproche de celles des moustiques. L’équation pour le futur est inquiétante : Plus de population, moins de ressources, pas de gouvernance éclairée et les habitudes indéboulonnables semble promettre Mada à un futur peu appétissant. Et les Blancs, les Waza n’y peuvent pas grand’chose. Le tourisme est peu développé. Et dans quarante ans, si les choses continuent de cette manière, quel Blanc d’Europe pourrait avoir envie de se balader dans un pays où les tensions sociales seront élevées et les plages un peu moins accueillantes ? Et les Blancs d’ici seront tellement fatigués et mangés par la léthargie des Tropiques qu’ils feront figure d’épouvantails asséchés. Mais mis à part ça, tout va bien Madame la Marquise et l’équipage d’Arafura a toujours bonne santé et son moral est d’acier !

Tiens, on vient de rencontrer un Français qui habite ici depuis 14 ans. Il travaille dans le concombre de mer. Son travail consiste à inséminer ces bestioles et à vendre les jeunes aux locaux pour que ces derniers les nourrissent jusqu’à maturité. Une fois atteint le ration poids/taille commercialement intéressant, le Français les rachète (les concombres adultes) pour les vendre aux Chinois. Ce cycle devrait fonctionner mais en fait ne fonctionne pas ou mal car des vendeurs extérieurs cassent ce mécanisme qui a besoin d’une solidarité entre les locaux et ce Français. De plus, les concombres sauvages sont en voie de disparition car pêchées à outrance. L’appétit des Chinois semble insatiable. Et le rôle des concombres de mer demeure capital pour les lagons car ils bouffent à pleines dents une montagne de déchets divers. A cela se rajoute l’érosion des sols qui chargent les rivières de sédiments qui font mourir les coraux… Bref, l’exploitation de la forêt dans les hauts plateaux précipite la mort annoncée des lagons (toujours d’après ce Français…). Même son de cloche chez un Sud Af (Sud Africain), surfeur devant l’Eternel et marié avec une Suisso-Malgache) qui, très prosaïquement décrète que Mada is fucked up. Langage de surfeur peut être mais qui semble bien résumer le sentiment général des gens qui réfléchissent un peu malgré la chaleur.

Mais encore une fois, tout va bien, et les locaux semblent se balancer totalement du futur. Pas une mauvaise idée s’ils veulent garder leur sourire souvent édenté.

Concernant le programme, et oui, nous allons enfin repartir ! Demain, appareillage à l’aube pour rejoindre un petit village à la sortie sud du lagon avec l’espoir de quelques belles sessions snorkling. Ce sera très probablement la dernière escale à Madagascar avant de se lancer pour la grande traversée sur Richards Bay, en Afrique du Sud ! Temps de traversée, environ 6-7 jours si les alizés le veulent bien.

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