"petite" escale technique...

Life on Patchwork
Sat 30 Oct 2021 05:47

Notre position à 23h30 UTC le  29 octobre 2021 : 16:42.6S 145:21.0W

 

 

Nous sommes partis mercredi matin sous un beau ciel bleu. La mer était belle, quel plaisir d’être en mer sans avoir le mal de mer et en profitant tout simplement de la navigation! Des dauphins sont même venus nous souhaiter bon voyage!

Nous avons passé la première nuit appuyé avec la “brise nanni” ( le petit nom que l’on donne à notre moteur ;) ), nous savions que cette première journée serait calme et nous attendions donc à mettre un peu le moteur. Aux premières lueurs du jour, lorsque je prends mon quart, le vent se lève avec le soleil. J’éteins le moteur, et ça y est, Patchorwk vogue sous voiles! Quelle émotion, nous avons la sensation d’ être vraiment partis!

 

Mais en début d’après-midi la météo et la mer se font moins clémentes. Les grains s’enchaînent, perturbant le vent. On alterne la pétole avec des rafales à 35 noeuds lorsqu’il pleut. Ce n’est pas des plus agréable, on se prend des seaux d’eau dans la figure, surfant parfois a 10 noeuds dans les vagues. Tout a coup, un gros bruit se fait entendre dans la bôme de grand voile : l’attache au niveau du mât vient de lâcher! La bôme ne tient plus que par l’écoute et la voile. Thomas fait une réparation temporaire avec un cordage, et on continue, toujours sous les grains. Ce temps a raison de la résistance de notre capitaine, c’est à son tour d’ être dans la zone de vomi!

En fin de journée, il n’y a plus du tout de vent, mais la mer est bien formée. Le bateau se balance au grés des vagues, les voiles claquent. Nous décidons d’affaler la grand voile avant la nuit.

 

Pluie, houle, pas de vent, une avarie sur la bôme de grand voile : nous décidons de mettre le cap sur l’ île la plus proche afin de faire une escale pour attendre une météo plus favorable, et pour réparer. Cap sur Fakarava!

 

Nous passons la nuit au moteur, a l’abri dans le bateau pour ne pas tremper d’autres vêtements, en sortant de temps en temps pour faire un tour d’horizon. Vers 5h du matin,  le vent se lève et nous aide à tenir le cap. Mais petit a petit il tourne, et nous nous retrouvons vent dans le nez. Il nous reste 15 miles à parcourir, et nous décidons de maintenir le cap, appuyés par le moteur. Le bateau s’écrase violemment dans les vagues que l’on prend presque de face, ce qui n’est pas du gout de nos panneaux solaires fixés sur l’avant du bateau. Les attaches lâchent, et les panneaux tombent sur le pont. Il pleut toujours averse. Tout a coup, on entend un bruit terrible venant du moteur. Vite, point mort. On suspecte un cordage qui se serait pris dans l’helice. On met le bateau à la cape (cap? Il y a débat a bord) pour réduire au maximum notre vitesse. Malgré mes peurs, Thomas se sent de plonger pour aller voir ce qu’il en est. Il s’attache au bateau, met un masque, et plonge. L’angoisse me serre la gorge. Thomas refait surface, et remonte à bord. Verdict : un bout d’aluminium s’est entouré sur l'arbre d’hélice, impossible de le défaire à la main dans cette houle. Mais d’ou vient ce mystérieux morceau d’aluminium? Sans doute du panneau solaire qui a finit par se faire la malle à babord!

 

Rejoindre Fakarava est maitenant impossible : nous ne pourrons pas faire les 11 miles qui nous en séparent sans grand voile ni moteur avant la nuit… Que faire? Nous envisageons de demander de l’aide, peut- être se faire remorquer? Mais on ne se résout pas à lancer l’appel. On se dit qu’on n’en n’est pas la, et qu’on n’a pas envie de faire tout un foin. On envisage d’aller avec le vent, et de s’arrêter quand on le pourra. Mais quand? Ou?

 

Juste au sud, il y a ce petit atoll, que nous avions exclu des plans car la passe avait l’air très étroite et l’atoll tres peu habité, pas des plus judicieux donc pour faire nos réparations. Mais finalement, ça nous semble envisageable, d’autant plus que c’est exactement dans la bonne direction par rapport au vent. Nous mettons donc le cap sur l’entrée de Faaite. Nous avons les vagues trois quart arrière et le vent de travers. Nous avançons bien avec le genois, la pouilleuse et la trinquette : arrivée prevue vers 14h, on le tente!

 

Mais de nouveau le doute nous assaille. Et s’il y avait trop de courant dans la passe pour entrer a la voile? Nous sommes très récalcitrants à utiliser le moteur, ce morceau d’aluminium créant des vibrations inquiétantes dans l’arbre d’helice. Nous lançons finalement un appel radio, pour obtenir des informations sur cette passe et être rassurés. Pas de réponse. Il va falloir compter sur nous-mêmes!

 

A l’entrée de la passe, le fameux masse-carré (courant sortant de la passe qui rencontre la houle, je ne suis pas sure du tout de l’orthographe) est bien présent, le houle monte en pics dans tous les sens. Patchwork est secoué comme un prunier (une fois n’est pas coutume), mais continue d’avancer. Thomas slalome entre les hauts fonds et les viviers, on estime qu’il y a 3 noeus de courant contraire. Pendant que le capitaine est en concentration maximale, je suis prête a l’écoute de génois. Paré a empanner, j’envoie! On évite encore un haut fond, puis on remonte au vent vers le mouillage. Thomas enroule le génois pendant que je prépare l’ancre, puis il se met face au vent ; je jette l’ancre. On affale les deux dernières voiles et on sécurise notre mouillage.

 

Entrer dans un atoll inconnu, par une passe étroite, et s’ancrer tout à la voile : ça c’est fait!

 

Fatigués et stressés, on positive en se disant que c’est dans les expériences difficiles que l’on peut montrer ses talents de navigateurs, et on a bien besoin de se donner du baume au coeur, alors on s’autocongratule un peu, avant d’enfin pouvoir relâcher la pression de ces dernières 24 heures.

 

Il est 19h30, on ne va pas tarder à aller dormir! La pluie nous a laissé un peu de répis à l’arrivée mais a repris de plus belle, nous n’avons pas encore eu le courage d’aller a terre. Nous allons nous reposer, puis effectuer les réparations nécessaires, attendre une météo favorable, on vous tiendra informés de la suite!

 

A bientôt,

Alexandrine et Thomas