LE PASSAGE DES ECLUSES

Noeluna en route pour Singapour
Matthieu Vermersch
Sun 24 Jan 2010 15:29

La traversee du Canal de Panama se passe a peu pres en 24h. La moitie des bateaux du rallye a quitte la marina de Colon hier vers 14h30 (nous etions les derniers  comme d’habitude), pour se rendre a l’entree du Canal et attendre son heure de passage. Vers 16h30 un bateau remorqueur  a delivre a chaque embarcation son propre « counsellor », le specialiste du passage ; c’est lui qui accompagne chaque bateau d’un bout a l’autre des ecluses. Ricardo est charmant, il est le superviseur de tous les aides pilotes et se trouve a la fin du convoi pour verifier que tout se passe bien.

Nous sommes 15 bateaux repartis en 5 rangs et formerons un convoi a part, sans autre bateau ; 3 bateaux par rang sont relies par des cordages et vont voguer sur les ecluses ensemble. Nous sommes au dernier rang et ne sommes que 2, un monocoque de 45 pieds et nous, un catamaran de 42 pieds. A partir de ce moment la il va falloir se deplacer ensemble, accolles comme des freres siamois, dans les courants tres forts des ecluses. Une equipe se trouvera a l’exterieur du bateau, cote babord (gauche), Bertrand a l’avant, Guillaume et Ferdinand a l’arriere ; ils seront relies aux employes du Canal par de gros cordages de 40 metres de long. Cote interieur du bateau se trouvent Matthieu a la barre qui devra essayer de maintenir les 2 bateaux stables et droits pendant toute la procedure, et ce malgre les enormes mouvements d’eau. Liliana, Marguerite et moi serons polyvalentes : supervision des cables qui nous relient a l’autre bateau –parebattage contre parebattage-, un œil sur les garcons et prise de photos.

 

Les ecluses s’ouvrent et le convoi avance. Les ecluses se referment derriere nous, et l’eau se met a monter. Le role de Bertrand et des garcons est de tirer sur les cordages au fur et a mesure que le niveau s’eleve. Cela va tres vite et les enfants sont un peu surpris, mais se mettent a tirer tres efficacement sur les cordes, et ce au moment opportun, ce qui est la vraie gageure. Soudain les bateaux devant nous se mettent a deriver vers la droite puis la gauche, et l’on apercoit les equipages se precipiter sur les cordages d’un cote  puis de l’autre. Le canal a beau etre assez large pour accueillir des cargos de 200 metres de long et 40 metres de large, les murs paraissent bien proches ; en fait un bateau lourd et large a beaucoup moins d’amplitude de mouvement qu’une plus petite embarcation. Tous les caps sont  redresses et nous nous decontractons un peu. Nous nous sommes eleves de 8 metres en 15 minutes…  La deuxieme serie de portes s’ouvrent et nous rentrons dans l’ecluse suivante. Et les portes se referment a nouveau… L’operation se renouvelle encore 1 fois jusqu'à ce que nous trouvions dans la  troisieme ecluse. C’est la partie un peu angoissante de l’histoire ; ces portes ont beau  resister depuis pres de 100 ans, on ne peut s’empecher d’imaginer qu’elles pourraient ceder et nous faire redescendre les 26 metres qui nous separent du point de depart en quelques secondes. Ces 26 metres ont été franchis en 1h30 environ, en comptant le temps de passage et  d’installation dans chaque ecluse.

 

Il est 21h15, nous quittons les ecluses pour nous enfoncer dans le paysage obscure du Lac de Gatun, lac artificiel construit entre les deux series d’ecluses. Nous cherchons un endroit pour nous ancrer et passer la nuit. Notre counsellor saute sur le remorqueur qui est passe le recuperer, a la suite de ses 15 collegues.

 

Nous avions remarque que les habitants de Colon avaient plus le type des habitants des Caraibes que le type colombien (Panama faisait autrefois partie de la Colombie). En visitant les ecluses par le haut, il y a deux jours, puis en lisant des documents sur la construction du Canal, nous avons compris que lorsque les travaux ont commence sous la direction de Ferdinand de Lesseps, en 1880, les quelques  17 000 travailleurs employes venaient des Caraibes. Une grande partie des habitants de Panama est probablement issue de ces hommes incroyablement courageux qui ont du affronter les ecoulements de boue, les inondations, la malaria, la fievre jaune et des conditions de vie particulierement rude, pour que ce canal puisse voir le jour.

Apres l’echec du projet francais, les americains reprennent la direction du canal et parviennent a eradiquer les maladies sur le chantier. Le canal sera uinaugure en 1914. 6700 personnes ont laisse leurs vies sur le site du chantier.

 

Ce matin nous sommes en route pour la deuxieme partie des ecluses…

 

Ciao,

 

Marie-Anne

PS : le pamplemousse rose en revanche tient bien la route… par rapport aux bananes…