les phares carrés sont dans la p lace

Life on Patchwork
Mon 22 Nov 2021 17:24

Apparement ce message n’a pas été publié le 20, donc le voici:

 

Notre position à 19h00 UTC le 20 novembre 2021 : 25:54.1S 120:39.3W

 

Bonjour à tous,

 

Jeudi. Magnifique journée vent de travers, on est sur l’autoroute comme vous le disait Thomas. Mais vers 16h, le vent s’arrête. Les voiles claquent, le bateau est balloté dans la houle. J’attends de voir. Tout à coup, le vent fait un virage à 90 degrés, presque vent arrière. Ayant peur que l’on empane inopinément, je coupe le pilote automatique et change de cap, tout en réveillant Thomas de sa sieste. Le matin, le téléphone satellite a eu un beugue, et nous n’avons pas pu récupérer le fichier météo. Nous savons que nous pourrons passer vent arrière à un moment donné, mais qu’il ne faut pas le faire trop tôt au risque de se retrouver dans la pétole ou les vents contraires. Thomas s’empresse donc de récupérer la météo pour savoir ce qu’il en est. Les voiles continuent de claquer désagréablement. Thomas donne le feu vert pour hisser les phares carrés, tout en continuant à analyser les tendances pour les prochains jours. Je ne l’écoute plus. Je n’au qu’une chose en tête : affaler ces p*t*** de voiles qui claquent!

 

Je sors du bateau et annonce : on affale la grand voile! Thomas me rejoint et on s’exécute. A peine la grand voile affalée, il se met à pleuvoir. J’enroule le génois et prend la barre, Thomas affale la pouilleuse et la trinquette, et déploie les phares carrés…juste à temps : la pluie s’intensifie dans le grain, et le vent se lève à 25 noeuds. Patchwork file à 8 noeuds! On est trempés, frigorifiés, mais fiers : on a eu l’intuition, le timing parfait! On est ravis de rentrer se réchauffer dans le bateau, à grand renfort de plaids et de tisane 😉

Après le passage du grain, le vent redescend mais persiste dans la même direction. Dans la nuit, le vent s’arrête presque totalement et les grains s’enchaînent. Les phares carrés nous permettent de ne pas nous soucier du vent variable : pas de risque d’empanage, pas de voiles qui claquent, ils peuvent supporter sans problems jusqu’ à 35 noeuds. Nous sommes seuls au milieu du Pacifique avec l’AIS allumée. Pour une fois, nous décidons de dormir tous les deux! ( bien sur on ne dort que sur une oreille et on se réveille instinctivement au moindre signe de changement) Quel plaisir!

 

Vendredi. Le soleil refait son apparition et le vent s’établit. Thomas, tel un prestidigitateur qui a plus d’un tour dans son sac, sort sa “voile mystère” : le genois qui avait fait office de grand voile il y a quelques jours sert à present de spi sur le mat arrière! C’est très efficace, le bateau file à 6-7 noeuds dans 10-15 noeuds de vent ¾ arrière.

Au moment du coucher du soleil, un grain nous pousse à affaler notre joker, puis le vent s’arrête. Décidément! Et puis le voilà qui revient, avec un virage à 90 degrés! Nous voici vent dans le nez! Je peux vous assurer qu’on ne s’ennuie pas dans cette traverse! Magnanimes, nous changeons de cap et allons ou le vent nous porte. A ce stade, plus la force de batailler, surtout que le ciel est chargé de grains. On n’a aucune envie d’affaler les phares carrés pour remettre toutes les autres voiles, pour on ne sait combien de temps. Dans la nuit, le vent tourne petit à petit, et on enroule notre trajectoire en conséquence (notre trace fait un joli arc de cercle sur le logiciel de navigation!). C’est sans doute un gros nuage qui est venu perturber le vent.

 

Samedi. Depuis le milieu de nuit nous avons repris notre trajectoire. Le vent souffle à 20-25 noeuds. Les grains s’enchaînent. Les phares carrés nous apportent un confort exceptionnel. Le bateau file à 7 noeuds pendant qu’on est tranquillement installés au chaud (oui car il commence à faire frais sous cette latitude!) sur notre canapé! De temps en temps, nous sortons un bout de nez timide dehors pour faire un tour d’horizon, avant de refermer la porte sur la grisaille et le vent, pour se retrouver dans notre cocon sur l’océan.

 

D’après les prévisions météo, nous devrions pouvoir naviguer encore avec les phares carrés direction sud-est pendant encore 3 jours, puis nous devrons traverser un anticyclone avant de pouvoir récupérer de nouveau des vents favorables. La partie n’est donc pas encore gagnée, et les 2500 miles qu’il nous reste à parcourir regorgerons sans doutes de petites péripéties que je me régalerais de vous raconter.

 

J’espère que vous allez bien.

 

Vivent les phares carrés, et vive le vent arrière!

 

A bientôt,

 

Alexandrine