TAHITI_tour de lile_ARUE_saga de la BOUNTY_Muti nés de Pitcairn

EtoileDeLune
nathalie & dominique cathala
Wed 9 Feb 2011 00:28

 Bonjour,

Voici la suite de la saga. Aujourd'hui, nous partons à la découverte des deux îles les plus "perdues" du Pacifique : Pitcairn et Norfolk. Celles où la descendance des révoltés de la Bounty vivent encore. Comment sont-ils arrivés jusque là? Quelle fut leur épopée? Aujourd'hui, que sont-ils devenus? Voici les réponses à ces questions.

Sommaire de cet épisode
Les mutinés de Pitcairn
Une société modèle sur les bases de destins troublés

1793 Pitcairn : la mutinerie des Tahitiens
L'établissement d'une société idéale
Le devenir de la descendance des mutinés
Les descendants des mutinés à fond dans le 21ième siècle
    Un souffle d'indépendance
    Un souffle d'air pur...
Sources bibliographiques et photographiques

Les mutinés de Pitcairn

Lorsqu'il quitte Tahiti, en septembre 1789, pour trouver une île « hors du genre humain », Fletcher Christian est accompagné de 8 mutins dont les tempéraments très différents vont sceller le destin de la future colonie :
Jonathan Mills,
Isaac Martin,
William Brown,
Edward Young,
William McCoy,
Jonathan Williams,
Mathew Quintrell,
Alexander Smith

Douze Tahitiennes et huit Tahitiens embarquent aussi à bord de la Bounty. Certains témoignages laissent entendre, que les autochtones, surpris par le départ rapide de la Bounty, n'avaient pas choisi de quitter leur île définitivement. Ils parlent donc de « kidnapping ».

Pendant plus de 20 ans, personne n'aura la moindre nouvelle les concernant. En 1809, un bateau de Boston, la Topaze, fait escale à Pitcairn et raconte, à son retour, avoir rencontré la descendance des mutinés de la Bounty. En 1814, d'autres récits analogues parviennent à l'amirauté par l'entremise des équipages de deux navires de guerre anglais. Finalement, en 1825, Frederick Beechey, le commandant du Blossom, explore le Pacifique Sud en détail et cartographie correctement Pitcairn, où il accueille à son bord, Alexander Smith, âgé de 65 ans. Il est le patriarche d'une communauté modèle et paisible de 66 habitants. Il raconte l'épopée des mutinés du Bounty.

Une société modèle sur les bases de destins troublés

Après avoir quitté Tahiti, Fletcher Christian hésite entre les Marquises et Pitcairn. Il choisit cette dernière, qu'il rallie en quelques jours. L'île présente plusieurs avantages. Elle est mal cartographiée, et donc, presque  « invisible » aux pourchasseurs des mutins. L'île est inhabitée et fertile. La petite colonie s'installe et brûle la Bounty le 23 janvier 1790.

Les mutins se partagent l'île en neuf parts égales. Ce qui représente une première frustration pour les Tahitiens, réduits quant à eux, à des tâches subalternes sans possession de terrain. La deuxième frustration est à mettre sur le compte du nombre de femmes. Chaque blanc se met en couple avec une Tahitienne, tandis que les Tahitiens se partagent trois femmes pour huit hommes. Néanmoins, la communauté fonctionne sous les meilleurs auspices pendant plus de deux ans. Christian, en chef de clan, se montre toujours gai et son exemple de bonnes manières contribuent à inciter ses compagnons au travail. Il est décrit par Smith, comme « un caractère heureux et ouvert qui sait tout au long de l'établissement de la petite colonie, attirer à lui l'estime et le respect de tous. »

1793 Pitcairn : la mutinerie des Tahitiens

L'un des mutinés, nommé Jonathan Williams, perd sa femme à la suite d'une chute. Il manifeste sa frustration et oblige la communauté à lui livrer une autre femme. Christian se voit forcer de demander à un Tahitien se se sacrifier pour lui donner sa propre femme. Cette injustice supplémentaire à l'égard des Tahitiens met le feu aux poudres. Après un attentat raté contre les blancs, un autre survient où cette fois, les Tahitiens ne manquent pas leur coup. Cinq des mutinés sont exterminés, dont Fletcher Christian. Les Tahitiennes ne supportant pas le geste de leurs compatriotes s'emparent à leur tour des armes. Il ne reste au bout de leur vengeance plus un seul Tahitien vivant sur l'île.

Au bout de cette journée du 3 octobre 1793, il ne reste alors sur l'île que dix femmes et quatre blancs (Young, Smith, Quintal et Mac Coy) ainsi que quelques enfants. L'ironie de ce carnage transparaît dans le décompte des survivants. Car les pires oppresseurs des Tahitiens, Quintal et Mac Coy, n'ont pas péri. La leçon ne les atteint pas, car ils continuent après cette mauvaise expérience de maltraiter leurs femmes, qui plusieurs fois, formulent le désir de construire une pirogue pour regagner Tahiti.

Jusqu'en 1798, Alexander Smith et Young gèrent au mieux la petite colonie. Une paix s'installe, une routine du quotidien permet à chacun de vivre de sa production. Mais, Mac Coy qui avait travaillé, avant de s'embarquer sur la Bounty, dans une distillerie d'Ecosse, trouve cette année-là le moyen de fabriquer un alambic et de l'alcool. Mac Coy, dans un de ses accès de delirium tremens, se jette du haut d'une falaise. La communauté, sous le choc de cet épisode meurtrier, décidera de ne plus jamais boire une goutte d'alcool.

L'établissement d'une société idéale

Quintal pour sa part, se révèle le seul élément perturbateur de la colonie. Il persécute Young et Smith, intente plusieurs fois à leur vie, pour des raisons fantaisistes. Young et Smith, soucieux de préserver leur colonie se voient obligés de l'exécuter en 1799.

Le dix-huitième siècle s'achève, sur Pitcairn, donc avec une colonie nantie de deux mutins survivants, de quelques femmes et de multiples enfants. L'équilibre est désormais possible. Young et Smith s'acharnent à bâtir une société exemplaire. Ils commencent par instaurer un office religieux dominical. Young, issu d'une famille, jugée respectable par Smith, fort d'une éducation sérieuse, met en place une sorte de système d'éducation destiné à faire grandir les descendants de ses compagnons dans une atmosphère de respect et de travail communautaire. Malheureusement, pris d'une affection pulmonaire, il s'éteint le 25 décembre 1800. Smith, nanti d'un coeur de patriarche, s'évertue dès lors à mener toute la colonie vers un destin serein, une vie tranquille et bien menée dans le respect de leur environnement et de chacun.

Il y parvient fort bien, et Alexander Smith, qui se fait désormais appeler Adam's, peut être fier de laisser en 1829, à l'âge de 69 ans, une colonie de 86 insulaires dont tous les enfants nés après 1800 sont les siens.



Le devenir de la descendance des mutinés

En 1831, « le gouvernement anglais, craignant que le sol de Pitcairn (île de 5 km²) ne pût nourrir ses habitants, envoya deux navires avec ordre d'expatrier à Tahiti une partie de la population. » Mais, les enfants de Pitcairn tombent au pire moment de l'Histoire de Tahiti. Les autochtones, chamboulés dans leurs valeurs par l'établissement des blancs, se perdent dans un monde de dépravation, où les femmes se prostituent avec les marins des baleiniers et où les hommes meurent d'alcoolisme ou de maladies vénériennes. Beaucoup ne supportent pas ce monde de « scandales » et demandent à rentrer chez eux. Leur séjour tahitien ne dure que sept mois (de mars à septembre 1831).

En 1856, la petite île compte 200 habitants, ce qui décide le gouvernement de Nouvelle-Zélande à réitérer l'opération d'expatriation vers Norfolk, île à 3220 milles nautiques de Pitcairn, perdue dans le Pacifique Sud-ouest au coeur d'une triangle dont les sommets sont la Nouvelle-Zélande, l'Australie et la Nouvelle-Calédonie. Le 8 juin, 194 habitants de Pitcairn y accostent. Les nouveaux venus occupent, dans un premier temps, les bâtiments désaffectés d'une colonie pénitentiaire qui y séjourna jusqu'en 1847. Les descendants des mutinés poursuivent à Norfolk, les deux activités principales qu’ils menaient à Pitcairn : l’agriculture et la pêche à la baleine.

En 1858 et 1863, quelques familles retournent sur Pitcairn. Tandis que  la population de Norfolk croît lentement et jusqu'à compter aujourd'hui 2000 habitants, celle de Pitcairn se stabilise autour d'une cinquantaine d'occupants.  Actuellement, Pitcairn, territoire britannique est administré par la Nouvelle-Zélande. Tandis que Norfolk est un territoire autonome placé sous la houlette australienne en ce qui concerne ses relations extérieures.

Les descendants des mutinés à fond dans le 21ième siècle

Un souffle d'indépendance

Récemment les descendants des mutinés ont été mis à l'honneur dans les médias. En 2005, le 27 octobre, à la Pointe Vénus, qui se situe à quelques petits kilomètres de la commune d'Arue, le ministre de la Culture de Polynésie, Tauhiti Nena, invitait 200 descendants des mutinés venus des quatre coins de la planète, à commémorer, l'arrivée 217 ans plus tôt, en baie de Matavai du navire de leurs illustres ancêtres : La Bounty.

Lors de son discours d'inauguration, il prononça cette phrase ;
« Ces hommes en se révoltant contre l'injustice et la tyrannie s'inscrivaient dans la logique de l'esprit de liberté et de justice incarné un an plus tard par la révolution française »

On y sentirait, comme un très léger air d'indépendantisme...

Un souffle d'air pur


Un article du Monde de novembre 2010, évoquait lui aussi la descendance des mutinés. A Norfolk, l'année 2011 sera pionnière. En effet, une expérience unique dans le domaine du « marché du carbone » y est mise en oeuvre. Gary Egger, chercheur à l'université de Southern Cross dans le nord de la nouvelle galles en Australie est l'initiateur de ce projet. Il a ciblé l'île de Norfolk, pour son éloignement et la taille réduite de sa population, afin de réaliser une étude grandeur nature.

Durant trois ans, les habitants qui le souhaitent recevront une « carte carbone ». Elle fonctionne comme une carte de « crédit » ou de « débit », avec un code secret et une unités de décompte en carbone. Chaque fois que les propriétaires de la carte achètent du carburant ou toute autre combustible, ils utilisent cette « carte carbone », qui déduit le nombre d'unités équivalent à l'achat énergétique. Au fur et à mesure de l'année qui passe, les habitants devront gérer leur dépense, pour que leur carte reste « positive ». Dans le cas où la totalité des unités seraient consommées, ils devraient en racheter. Par contre, en substituants leurs habitudes de dépenses énergétiques par des nouveaux réflexes plus écologiques, ils épargnent les unités de la carte, qui transformera en fin d'année, les unités carbones en espèces monnayables. Soit, un joli cadeau de fin d'année.

Gary Egger, ne se limite pas au problème des émanations de CO2 tant décriés sur notre planète, mais également à celui de la « mal-bouffe » (Junk food), cette carte prétendra aussi être utilisée lors des achats de « cuisine rapide », et décomptera des unités, tandis que ceux qui s'alimenteront de façon saine, mangeant des produits du terroir, gagneront des unités.

Les trente milles touristes qui viennent chaque année sur Norfolk, participeront, eux aussi, à l'expérience... Rendez-vous dans trois ans, pour voir si les familles Christian, Young, Adams... Smith, ..., assumeront le rôle de pionniers que les scientifiques leur offre... Dernière précision (un peu ironique), l'île de Norfolk est très convoitée par ses grandes voisines, en effet, les fonds sous-marins environnants recèlent d'une importante réserve d'hydro-carbure...
 
Vous retrouverez la fin de cette saga, dans la prochaine rubrique consacrée à l'exploitation du sujet au cinéma, et les retombées mémorables sur Tahiti
A plus...
Nat et Dom
www.etoiledelune.net


Pour écrire la saga du Bounty, j'ai consulté les sources bibliographiques suivantes :
 sur Internet (et d'images ou dessins anciens)

- Wikipedia
- http://www.jamesnormanhallhome.pf
- http://philippepoisson-hotmail.com.over-blog.com/article-32627428.html
- http://www.chroniquemichelandre.com
- http://expo-recits-de-voyage.edel.univ-poitiers.fr/index.html
- http://prisme.blog.lemonde.fr/2008/04/20/le-songe-du-conservateur/
- http://www.courrierinternational.com
- http://www.viaparisiana.com
- http://dansletempsjadis.canalblog.com
- http://pgosse.chez.com/maquette/story.htm
Livres
- Jean-Jo Scemla « Le voyage en Polynésie »
- Le Journal de James Morrison, second maître à bord de la Bounty Publications de la Société des océanites.
- Carnet de bord du capitaine Lafond de Lurcy
- 101 mots La Polynésie française
- Préfaces de Michel Le Bris de la trilogie de Norman Hall et Charles Nordhoff éditions Phébus Libretto

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