Marquises - Jour 1 - Position 10° 21.6' S - 137° 47.5' W

Canopus 3 on the Blue Water Rally
Jean Michel Coulon
Mon 24 Mar 2008 18:42
Je (Michel) viens de finir "Mon Nom est rouge" d'Orhan Pamuk, livre fascinant sur les rapports de l'art et la religion, le mécénat des princes, la question du style de l'artiste, le progrès dans l'art (ou l'influence - perverse - forcément de la peinture italienne de l'époque si contraire aux canons esthétiques de l'époque), amenant à regarder les miniatures persanes et ottomanes avec un autre oeil, doublé d'une intrigue et policière savoureuse. Dans ce roman, les personnages s'expriment et décrivent la scène à laquelle ils ont participé, chacun à leur tour.
Dans le même style, notre découverte de Fatu Hiva...
 
My name is Robby:
We arrived around 1630 this afternoon, and the guidebooks' raving about Hanavave Bay proved if anything understated.  We are tucked between soaring cliffs on left and right, with a tiny beach and tinier village in front and the ocean behind.  The vegetation on the surrounding hills is every shade of green, the lava cones around the bay are impressive, and once we had anchored we could hear birds singing lustily on the nearest hillside. 
The guidebooks were also accurate in stating that tourist infrastructure here is nonexistent, as Michel and JM were able to confirm when they went ashore, an excursion that encountered a few problems.  JM realized after inflating the dingy that he had forgotten to insert the board that serves as a seat for whoever is rowing (he did not want the additional hassle of maneuvering the outboard into place).  Eventually we will need to deflate the dingy enough to insert the board, but this afternoon whoever rowed did so while kneeling, and happily the distance to be covered was short.  Also happily, what reportedly can often be a wet landing was admirably dry; not so happily, while still alongside Canopus Michel somehow slipped most of the way out of the dingy, soaking everything above his ankles; including phone and camera.  The camera is waterproof and seems fine, but the phone is neither.  While they were ashore, to add insult to injury, I enjoyed by far the most dramatic sunset of our cruise.  Michel, who has been poised on the bow of Canopus every evening in hopes of photographing such a sunset, instead had an obstructed view from the village.  As you have correctly concluded; I stayed on the boat, in part because I believed the guidebooks, in part because I felt no need to get off the boat (a huge contrast with how I felt after crossing the Atlantic), and finally in part because I wanted to be sure the anchor had set properly.
Tomorrow (the 24th) we will sail to Hiva Oa, where Gauguin and Brel are buried; if the weather cooperates we will stop along the way at two bays on the island of Tahuata, one considered stunningly beautiful and the other an excellent place to go snorkeling.  Thus far our introduction to the Marquesas could not be more successful, certain dunked accessories notwithstanding.
 
Mon nom est Michel:
Dimanche 23 mars 20h11
Ca y est, nous y sommes, mouillés dans la baie de Hanavave, à Fatu Hiva, après 19 jours de mer... Nous y sommes arrivés à la bonne heure, vers 16h, avec la lumière comme il faut.
On a aperçu sa masse dès 13h30, aux contours à ,peine marqués dans un fond de nuages. Puis elle a grandi de plus en plus... On pouvait apercevoir aussi par travers tribord la masse plus petite de Morane, un ilôt au large de Hiva Oa. Des frégates nous ont  survolés, un peu plus loin des oiseaux tournoyant au dessus de l'eau. Nous l'avons contournée par le Nord pour rejoindre la baie. Nous étions tous les trois assis chacun à un point du capot, avec nos appareils photo et jumelles, maitrisant notre excitation, Jean-Michel au cockpit, Robby sur le roof et moi tout à l'avant... Nous l'avons regardée grandir, les détails apparaitre, côte sauvage, abrupte, des parois quasi verticales de la crête du sommet à 1000 m jusqu'à la mer, épaulées par des éperons pointus, assez verdoyantes tout de même, avec quelques zones dénudées laissant apparaitre la roche volcanique. Puis on a passé le cap nord. Encore des parois à pic vertigineuses et l'amorce de la baie.
C'est une impression fabuleuse. On a d'abord aperçu au fond de la baie les mâts de 4 voiliers au mouillage, puis la végétation est devenue discernable: des palmiers étrangement accrochés à des pentes raides, là encore des crêtes
découpées de la caldeira comme dans les cirques de la Réunion, des parois de 5/600 m qui plongent droit dans la mer, le vert des arbres, le rouge et le noir des basaltes et des cendres. Et chaque fois qu'une pointe se dérobe, on voit un peu plus profond dans la baie, le ressac sur une plage noire, les filets des buts d'un terrain de foot au bord de l'eau, le clocher bas d'une petite église, quelques habitations, les blocs de béton formant jetée pour protéger de la houle incessante. Des palmiers, des arbres, de la végétation, de grandes parois noires de cendres compressées, une vallée de plus en plus étroite s'enfonçant dans la montagne.
Nous avons jeté l'ancre, 9 m de fond, 30 m de chaine, prudents, car il est dit que certains bateaux se sont trouvés entrainés au large avec leur mouillage les faisant piquer du nez... La cloche de l'église sonne les vêpres de Pâques. C'est le calme, plus de moteur, des rafales de vent venant des hauteurs nous caressent, on est arrivé, on regarde!
Puis nous avons gonflé l'annexe, ce qui n'est pas un mince travail. J'ai allumé mon téléphone Orange, on ne sait jamais et... ding, ding: des messages arrivent. Robby préfère rester sur Canopus, Jean-Michel embarque,
j'attrape mon appareil photo, je glisse le téléphone dans ma poche, en me réjouissant de pouvoir vous envoyer un SMS de bonne arrivée, j'embarque, Jean-Michel se met aux rames, je recule et m'assieds sur l'arrière, et...
bascule dans l'eau, les pieds toujours dans le bateau! J'avais oublié que ce n'était pas un boudin à l'arrière mais la planche sur laquelle on accroche le moteur. Téléphone foutu, appareil photo heureusement étanche marche toujours.
Quelques coups de rame, la jetée protège bien du ressac. Le spectacle des caisses voltigeant des pirogues vers le quai exposé lors de l'arrivée du caboteur approvisionnant les iles appartient au passé. On amarre. Des pirogues à
balancier tirées au sec. Jambes chaloupantes. Cabine téléphonique modèle France Telecom 1980, grosse parabole orientée vers les antennes relais posées sur la crête, là-bas tout en haut. Pavillon avec des affiches de
lutte contre le diabète et le tabac, des précautions à prendre contre la dengue et la filiarose, le dépistage du cancer chez les femmes..., c'est lui peut-être qui fait office de magasin, dans le style tabac-épicerie-bar-PMU des petits villages de la "métropole" si lointaine, on continue dans la rue principale du village qui méandre en s'enfonçant vers l'intérieur dans le défilé, chants d'alleluia s'échappant de l'église, école proprette, maisons coquettes avec jardins fleuris, l'éclairage public s'allume, 4X4 ou camionnettes dans les garages, musique sirupeuse " le ciel sans nuages..." sortant d'une véranda avec quelques autochtones prenant le frais, ruisseaux qui gougloutent, route de béton.
Un chien efflanqué passe en nous ignorant totalement comme si nous n'étions pas étrangers à tout cet endroit! Deux fillettes nous croisent et nous disent bonsoir dans un bon français, avec l'accent tahitien, dit JM qui a passé quelque temps à Tahiti. On revient, un 4X4 nous dépasse, s'arrête, un couple nous salue, Jean-Michel rêvant d'une bière demande si le magasin est ouvert - non, il est fermé mais demain après-midi... C'est assez surréaliste en fait, à des milliers de km de la mère patrie et 19 jours de mer sans voir de terre...
Nous rentrons, reprenons l'annexe, le soir tombe, le coucher de soleil était très beau, nous dit Robby, le plus
beau depuis que nous avons quitté les Galapagos. Je passe mes instruments à l'eau douce, les sèche au sèche-cheveux, on verra demain Inch Allah! je me réjouissais tant de vous surprendre avec un SMS...Sniff!
Robby prépare un pastis, je lance un rôti de boeuf à la cocotte, une boite de haricots verts, le reste de la pâte à crêpe (3 petites demi seulement), Jean-Michel part se coucher, Robby fait la vaisselle et je t'écris.
Il est 21h02, la nuit est calme, le bateau bouge à peine, bien que le vent souffle fort dévalant la montagne et le fasse tourner et retourner sur lui-même.On repart demain matin pour Hiva Hoa avec passage devant l'ilôt
Tahuata et arrêt snorkeling si le temps le permet. Dîner à terre, décrète Jean-Michel, si le temps le permet à Hiva Hoa. Chouette, Robby s'en pourlèche les babines d'avance, moi aussi!
 
Je m'appelle Jean-Michel...
Juste la place d'ajouter une photo de notre arrivée hier. Voir les commentaires ci-dessus.
L'endroit s'appelle Baie des Vierges. On dit qu'il s'appelait initialement Baie des Verges (voir photo), et que les missionnaires ont légèrement changé le nom.